4 vérités de la mondialisation (suite)
[Ming]
La minuscule rédaction de Contrepoison était présente samedi 15 à La Défense pour assister au colloque "Les 4 vérités de la mondialisation" organisé par les Cercles libéraux. Dans la mesure où il n'y a rien que vous ne connaissiez déjà à ce sujet, informés comme vous l'êtes par Vincent du blog Liberté, j'en ferai un compte rendu très personnel.
Fraîchement
acquis aux idées libérales après une désintoxication
agitée (il faudra qu'un jour Fabrice et moi, nous vous expliquions notre
bouillon originel :), c'était bien la première fois que je mettais
les pieds dans ce milieu. D'où une certaine curiosité. Un peu
déçue d'ailleurs, dans la mesure où les libéraux
sont à peu près comme moi (je veux dire : physiquement). Moralement
aussi : ils semblent souvent courtois, parfois moins, surtout aux alentours
d'un buffet. Un mot aussi sur le mausolée de Mitt l'Arche, aussi laide
à l'intérieur que pompeuse à l'extérieur. Une boîte
vide, pour ne pas dire creuse, et un aménagement intérieur blockhauso-miterrandien.
La beauté industrielle des coffrages de béton nu, la patine sur
les matériaux pauvres, le manque d'entretien : une marque de fabrique
de l'irréalisme socialiste. Tout un symbole.
C'est plutôt sur le plan intellectuel qu'il fallait chercher du grain à moudre. Passons sur la présentation de J.-F. Revel, bien fatigué, sur A. Madelin auquel je reviendrai plus tard, et sur l'intervention de Tokia Saïfi, égale à elle-même... c'est-à-dire membre du gouvernement. Quelles vérités sur la mondialisation sera-t-elle venue énoncer ? Mystère, la fumée de ses mots s'éparpille quand se lève le cyclone Malhuret, dont la charge à la hussarde emporte les positions alter-mondialistes. Je crois savoir que Fabrice développera un article là-dessus, et ce sera passionnant, croyez-moi
Pascal Salin vient ensuite démontrer la façon dont la liberté s'adosse nécessairement à la libre propriété, puis nous nous éparpillons entre différents salons. Nous allons suivre le forum consacré au thème "Le libéralime est-il un humanisme ?", au cours duquel le philosophe Y. Roucaute trace une généalogie des relations internationales axée sur l'idée hobbesienne que "L'Etat est un loup pour l'Etat". Il conclut à la fin récente de ce système et à l'avènement des Droits de l'homme comme fondement et outil des relations internationales.
La suite va trop vite, il y a trop de choses à dire. Je soulignerai tout de même l'intervention de Cl. Goasguen sur le combat à mener pour ouvrir le verrou stratégique de l'enseignement supérieur, et celle du journaliste Max-Henri Boulois sur la mondialisation et le sport, pour son sens de l'improvisation et son ironie assassine ("J'étais à une table ronde de l'UMP l'autre jour... Les méchants Américains par ci, les méchants Américains par là... Moi j'ai trouvé une solution : il faut éliminer les Américains."). Ce qui permet d'éclairer au passage les ambiguïtés de cette étrange "droite".
Pause-nouilles chinoises, puis direction vers "La mondialisation : une chance pour les pays pauvres ?", où le ministre sénégalais Aziz Sow expose brillamment les objectifs du NEPAD (New Partnership for African Development), démontrant ainsi que "L'Afrique à papa, c'est fini" : les dirigeants africains ont compris pour les avoir vécues les impasses de la "main tendue" et veulent se développer par leurs propres forces. De ce point de vue, comme le souligne A. Madelin, les Africains "ont des leçons à nous donner en matière d'ouverture". En matière de bonne gouvernance aussi, à ce qu'il semble. Henri Lepage, chargé du baronnage, n'a pas le temps de prendre la parole, dommage.
Passons à J. Norberg, et comme Vincent il me faut insister sur le charisme
de l'archange libertarien. Vous trouverez sur Contrepoison, dès que j'aurai
trouvé un scanner en état de marche, des extraits de son impitoyable
argumentaire, du même tonneau que le Plaidoyer (du moins ce que
j'ai pu en lire)[Mise à jour : tss tss pourquoi se prendre la tête
quand tout est là
?]. Bonne nouvelle à ce propos, il semble que celui-ci soit prévu
chez Plon
d'ici quelques mois. Tant pis pour l'opération de spéculation
internationale que Fabrice et moi nous apprêtions à monter... tant
mieux pour tous.
Arrive enfin (c'est une façon de parler hein)... A. Juppé. Il
faut que je vous avoue ce que j'essaie de vous cacher depuis le début
: nous sommes tous étiquetés d'un autocollant de l'UMP, co-organisatrice
de la journée. Juppé est chez lui en quelque sorte, mais je ne
peux m'empêcher de penser qu'il va y avoir du rififi. Juppé chez
les libéraux c'est Lord Fauntleroy chez les Iroquois ! L'inconscient
prend la parole, sourire en coin et commence ainsi : "La mondialisation,
je suis pour." (Pensée : drôle de façon de poser le
problème.) Suit l'inévitable "MAIS...", et un bon quart
d'heure de rhétorique reptilienne, de sophismes sinueux démontrant
qu'il est pour la mondialisation seulement dans la mesure où elle ne
nuit pas aux prérogatives de l'Etat. Et que par conséquent, il
nest PAS pour la mondialisation parce que gnagna raison garder. (Pensée
: quel dommage de finir de cette façon. Comme si un talon t'écrasait
le visage après cette journée de plaisir.) J'entends même,
à la fin, des aplaudissements, que je ne comprends pas, et n'ai toujours
pas compris : comment peut-on applaudir successivement Norberg et Juppé,
que tout ou presque oppose ? Je pense que certains à l'UMP, aussi libéraux
soient-ils - s'ils le sont, font le pari du choléra contre la peste dans
les années à venir. Mauvais calcul. Moi, comme nous l'a appris
Faré, je prononce "mu".
Pareil scandale ne pouvait rester impuni ! C'est un grand Madelin qui châtia
l'impudent, et de la belle manière, démontant chacun de ses sophismes,
chacune de ses apories, de ses demi-vérités, le sourire cruel,
le tutoiement florentin, se lançant dans une péroraison magnifique
sur le financement du FSE, la pensée magique, la "rule of law",
les Droits de l'homme, que sais-je encore ? et recueillant un fracas d'applaudissements.
Objectivement, Madelin en forme, "c'est la puissance d'un feu d'un croiseur
et des flingues de concours".
J'en arriverai à la même conclusion que Vincent. A nourrir de -légitimes-
inquiétudes sur le contexte français, on finit par perdre de vue
sa spécificité. Or, à l'échelle mondiale, la liberté
est cette force puissante qui "souffle dans nos voiles". Ou pour reprendre
la belle formule de Madelin (de mémoire), "le monde nouveau a des
idées, et ce sont des idées de liberté". Et cela nous
regonfle à bloc.